Discussion

Mercredi 2 avril – 18h – au Tanneries, 17 boulevard de Chicago

À partir d’extrait de Nihilisme et politique de Léo Strauss, et de À la fête de la révolution de Claudia Salaris, nous reviendront ensemble sur certains courants artistiques et politiques qui, avant de sombrer dans les méandres du fascisme, exprimèrent et expérimentèrent un rejet de la civilisation moderne qui ne nous est pas étranger aujourd’hui. Percevoir les ambivalences pour savoir trancher.

Nous mettrons ici en ligne les extraits que nous lirons ensemble ce jour-là, afin que ceux et celles qui le souhaitent puissent les lire ou les travailler en préparation de cette discussion.

Nihilisme et politique, Léo Strauss

9782743612375

Leo Strauss se penche sur la signification du nihilisme allemand, qu’il considère comme la base culturelle du national-socialisme. C’est la seule fois où il parle du nazisme, lui qui en a connu les premiers signes en tant qu’Allemand et en tant que juif. Son analyse est simple et lumineuse. Il démontre que loin d’être un phénomène lié à la folie d’un chef capable de sidérer un peuple entier, le nazisme est enraciné dans l’histoire de l’Allemagne moderne et dans l’histoire de la modernité. Sa critique s’inscrit dans la tradition philosophique classique et dans la tradition biblique, l’une et l’autre radicalement opposées au nihilisme contemporain. La crise de notre temps est tout entière là, avec les moyens donnés par la tradition de la surmonter.

Ce livre est composé de trois essais : Sur le nihilisme allemand (1941), La crise de notre temps (1962), et La crise de la philosophie politique (1962).

 

La fête de la révolution, de Claudia Salaris

002_210

En septembre 1919, le poète italien Gabriele D’Annunzio, à la tête d’une troupe de jeunes anciens combattants – les arditi -, s’empare, sur la côte adriatique, de la ville de Fiume afin de la rattacher à l’Italie. Pendant plus d’un an, Fiume va devenir une petite contre-société expérimentale, exprimant sa sympathie pour la jeune révolution soviétique et les peuples colonisés, nouant des contacts avec les milieux anarchistes mais inaugurant, simultanément, les formes d’expression du fascisme naissant – la chemise noire, le poignard au côté, le dialogue direct entre le tribun et la foule, la liturgie de masse.

L’aventure fiumaine est également attentive aux formes de rupture en matière de culture – avec Dada et aussi Marinetti et les futuristes – et de mœurs – elle autorise le divorce et accorde le droit de vote aux femmes, tolère l’homosexualité, l’usage des stupéfiants et le naturisme. Enfin, elle expérimente une  » économie pirate « , centrée sur la primauté du don comme valeur fondamentale du lien social. En fait, cet  » ordre lyrique  » des  » artistes au pouvoir  » et leur usage politique de la dérision font plus penser à mai 1968 qu’à l’émergence des mouvements et régimes totalitaires. Et Claudia Salaris explore superbement, grâce à une multitude de documents politiques et littéraires, ce qui fut l’un des premiers chapitres de la  » culture de la révolte  » qui a caractérisé le XXe siècle.